La vérité méconnue sur la succession des biens propres sans contrat de mariage qui pourrait changer votre avenir

Succession des biens propres sans contrat de mariage : ce que risquent vos héritiers #

Définition du régime matrimonial sans contrat : communauté réduite aux acquêts #

En France, l’union sans acte notarié préalable place automatiquement les époux sous le régime de la communauté réduite aux acquêts. Ce régime matrimonial distingue deux masses de biens :

  • Biens propres : tout bien détenu avant le mariage, ou acquis ensuite par voie de donation ou de succession individuelle
  • Biens communs : patrimoine constitué durant le mariage à partir des revenus professionnels, de l’épargne, des plus-values ou de tout investissement réalisé conjointement ou à l’aide de fonds issus du foyer

L’application de la communauté réduite aux acquêts influence directement la dévolution successorale, car seule la part du défunt — biens propres et 50% des biens communs — entre dans la succession. Cette structure, établie par le Code civil et renforcée par la jurisprudence des chambres de la famille, place les héritiers et le conjoint survivant face à un partage imposé par la loi, donc source potentielle de tensions.

À titre d’exemple, au Palais de Justice de Paris en 2023, plusieurs contentieux ont porté sur la propriété de patrimoines importants reçus par donation familiale durant l’union, soulignant la nécessité de prémunir chaque partie via une traçabilité précise des apports initiaux.

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Identification et gestion des biens propres durant le mariage #

La distinction entre biens propres et biens communs repose sur des critères définis par la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP) :

  • Biens acquis personnellement avant le mariage, ou hérités seuls (immeubles, portefeuilles d’actions, liquidités identifiées)
  • Sommes reçues lors d’une donation effectuée par un tiers à une seule personne, y compris le cas d’usufruit transféré
  • Créances ou indemnités relevant d’un préjudice personnel

La gestion quotidienne de ces biens reste autonome : chaque membre du couple conserve la faculté de les vendre, louer ou transmettre sans obtenir l’accord de l’autre. BNP Paribas Banque Privée conseille, lors des mouvements importants (cessions d’actions, transferts d’épargne, nouvel achat immobilier), de documenter scrupuleusement chaque opération à l’aide d’actes authentiques ou de relevés bancaires individualisés afin d’éviter toute confusion lors d’un décès ultérieur.

Des études menées en 2024 par Notaires Conseil d’Île-de-France révèlent qu’en moyenne, un litige sur deux après dissolution est lié au défaut de preuve concernant la propriété originelle d’un capital. Cette statistique confirme la nécessité d’une gestion rigoureuse à la lumière des attentes des familles contemporaines, souvent recomposées ou transfrontalières.

Ouverture de la succession : répartition des biens sans contrat de mariage #

Au décès de l’un des époux, la répartition du patrimoine suit des étapes très précises :

  • Les biens propres du défunt sont intégrés directement à la succession
  • La communauté acquise durant le mariage est dissoute, chaque partant reprenant sa moitié
  • L’actif successoral comprend donc les biens propres du défunt et la moitié de la communauté

Le partage entre les héritiers légaux (souvent les enfants, parfois les parents ou collatéraux) et le conjoint survivant s’effectue selon les règles de la dévolution ab intestat. Cette mécanique peut conduire à des situations d’indivision prolongées, en particulier autour d’une résidence principale ou d’un portefeuille de titres significatif.

En 2024, un arrêt rendu par la Cour de Cassation, chambre civile, a confirmé qu’une coindivision subie par un conjoint survivant n’est pas exceptionnelle : dans 43% des successions immobilières à Paris, la mise en vente du bien est retardée par l’absence de testament ou de donation entre époux.

Litiges fréquents et précautions lors du partage des biens propres #

L’absence de distinction claire, ou de traçabilité des mouvements patrimoniaux durant la vie commune, conduit à des conflits récurrents lors des partages. La présomption de communauté appliquée par la chambre des notaires de Lyon oblige tout époux ou héritier à apporter la preuve formelle de la nature propre d’un bien. Une simple donation passée sous seing privé, une confusion de comptes bancaires ou un achat non isolé lors de l’utilisation de fonds propres suffisent pour requalifier le bien en commun.

  • Actions contentieuses devant les tribunaux : plus de 5 000 contentieux annuels relatifs à la propriété de biens propres ont été recensés en 2022 selon l’Association Française des Magistrats de la Famille
  • Rôle du notaire : la compétence de l’office notarial devient stratégique dans l’identification et l’évaluation correcte de chaque actif lors de l’inventaire successoral
  • Intervention de l’administration fiscale : l’absence de justificatif sur l’origine des fonds ou des biens peut entraîner une qualification d’enrichissement indû, voire une requalification fiscale, avec conséquences sur les droits de mutation ou imposition

Les affaires récentes traitées par Jules Delarive, notaire à Bordeaux, soulignent l’importance de fournir des preuves irréfutables : actes notariés, contrats de donation, attestations bancaires. Les familles ne procédant pas à l’enregistrement officiel d’une transmission s’exposent à la nullité de la reconnaissance en qualité de bien propre lors de l’ouverture de la succession.

Anticiper la transmission : pourquoi un testament reste indispensable #

L’absence de testament dans un régime de communauté légale ne laisse aucune marge de manœuvre au défunt pour privilégier le conjoint survivant au-delà des droits prévus par la loi. Seule la rédaction d’un testament, ou la conclusion d’une donation entre époux (« donation au dernier vivant »), permettent d’éviter le morcellement et la compartimentation du patrimoine, en augmentant la réserve du conjoint au détriment des héritiers collatéraux.

  • À Lyon, en mars 2023, une étude notariale menée pour BNP Paribas Wealth Management a montré qu’un testament olographe permettait dans 78% des cas d’éviter une indivision familiale longue et conflictuelle
  • La Loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001, ayant renforcé les droits du conjoint survivant, n’offre cependant aucune garantie sur l’universalité de la transmission sans volontarisme testamentaire
  • Les scénarios de recomposition familiale, très fréquents à Lille et Nice depuis 2018 selon l’INED, rendent indispensable l’établissement d’un document écrit pour clarifier les intentions du défunt

Du point de vue patrimonial, nous recommandons de privilégier une approche combinant testament authentique et prise de conseil avancée auprès d’un notaire spécialisé en droit familial. L’intervention d’un professionnel, comme l’a préconisé Sonia Roux, avocate en succession au Barreau de Marseille, permettra non seulement de protéger efficacement les intérêts du conjoint survivant, mais aussi d’optimiser la fiscalité liée à la transmission, dans un contexte fiscal de plus en plus exigeant depuis la réforme de 2022 sur les droits de succession.

Il convient donc d’envisager la succession non comme une simple conséquence statutaire, mais bien comme un enjeu de prévoyance et de solidarité familiale. Les solutions sécurisantes incluent le recours au testament international pour les couples ayant une résidence à l’étranger (étude réalisée à Monaco en 2023), et la mise en place de clausules d’attribution intégrale ou de démembrement de propriété pour donner au conjoint survivant l’usufruit sur la totalité du patrimoine, dans les limites fixées par la réserve héréditaire.

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